[Test] Ghost of Yotei : Un fantôme dans l’ombre du samurai ? [FR]

2025 touche bientôt à sa fin, mais PlayStation n’a pas dit son dernier mot et dévoile sa deuxième exclusivité de l’année en ressuscitant une licence devenue culte. Ghost of Yotei est la suite du chef-d’œuvre Ghost of Tsushima. Sorti de nulle part à l’époque, Ghost of Tsushima avait su s’imposer comme l’une des exclusivités marquantes de 2020. Reste à savoir si Ghost of Yotei parvient à faire honneur à cet héritage.

Peut-on jouer à Ghost of Yotei sans avoir joué à Ghost of Tsushima ?

La réponse pourrait sembler évidente, mais oui : Ghost of Yotei est bel et bien un titre indépendant du premier opus. Pas besoin d’avoir terminé ni même lancé Ghost of Tsushima pour comprendre ou apprécier cette nouvelle aventure. Sucker Punch opte ici pour un changement complet de cap, avec un nouveau contexte et une intrigue inédite. Les personnages, les enjeux et même la structure du récit sont totalement repensés, offrant ainsi une porte d’entrée idéale pour les nouveaux venus comme pour les curieux souhaitant découvrir la licence sans passer par le premier épisode.

Une histoire de vengeance… Classique

Ghost of Yotei, second épisode de la série Ghost of Tsushima, prend une nouvelle direction en racontant le destin d’un nouveau protagoniste ou plutôt d’une nouvelle héroïne : Atsu. Le jeu démarre sur les chapeaux de roue : vous incarnez une mercenaire en quête de vengeance après le massacre de sa famille sur l’île de Yotei. Des années plus tard, elle revient sur place pour traquer les six assassins masqués responsables. (Tiens tiens… quelqu’un a parlé d’Assassin’s Creed ?) Bien qu’intrigante au départ, l’histoire révèle malheureusement ses faiblesses dès les premières minutes.

Imaginez-vous propulsé directement à un moment où le personnage a déjà atteint l’apogée de son parcours. Eh bien, c’est précisément là que commence Ghost of Yotei. Son passé, bien qu’intriguant, ne nous est révélé que plus tard, progressivement, après une bonne heure de jeu et parfois au fil de quêtes secondaires. D’entrée de jeu, ce choix de narration nuit clairement à l’implication et à la compréhension des enjeux.

Mais le hic ne s’arrête pas là, puisque le récit souffre également d’un certain manque de cohérence. Dans sa volonté de faire briller Atsu, le jeu finit paradoxalement par la desservir. Dès son retour à Yotei, la protagoniste semble déjà jouir d’une réputation de fantôme Onryo « badass », bien qu’elle ait fait ses preuves sur les terres du Japon et non sur l’île même. Un détail qui, dès le départ, trahit une écriture maladroite cherchant à lui donner du charisme sans véritable fondement.

Il aurait pourtant été intéressant d’explorer plus en profondeur la vision de la femme à cette époque. Atsu aurait pu incarner un propos plus fort, voire différent, sans que cela ne nuise à l’histoire. À la place, le jeu se contente d’effleurer le sujet et nous offre une héroïne quelque peu stéréotypée, tête brûlée et parfois caricaturale un acte manqué pour un personnage qui méritait mieux.

Atsu, souvent dotée d’un ego presque antipathique, aurait gagné à être traitée avec plus de nuance et de vulnérabilité. Il aurait été bien plus judicieux de nous faire vivre son passé et son ascension dès le début, à la manière d’un Assassin’s Creed III, afin de nous permettre de nous attacher à elle et de mieux comprendre la portée de sa vengeance et de sa progression. Mais Sucker Punch a choisi une autre voie pour ce second épisode.

Bien que le jeu tente d’apporter de la nuance au personnage tard dans le récit, l’aventure manque malgré tout de profondeur et se réduit rapidement à une histoire de vengeance assez convenue. Là où Ghost of Tsushima brillait par sa mise en scène historique et sa réflexion sur l’honneur au cœur de la guerre, Ghost of Yotei retombe dans un schéma plus classique : celui de la vengeance personnelle. Ce qui semblait au départ louable finit, au fil des heures, par devenir un simple prétexte.

Le ton sérieux du premier épisode laisse ici place à une ambiance plus légère, presque teintée de western à la John Wayne. L’humour y est plus présent, le récit plus manichéen, et l’ensemble s’éloigne du drame introspectif pour tendre vers un divertissement. Ce changement de ton déstabilise : le manque d’enjeux forts, combiné à une atmosphère plus légère, crée un décalage dans une série qui se voulait jusque-là grave et empreinte de mélancolie. Au final, l’histoire de Ghost of Yotei ne sait pas vraiment sur quel pied danser… mais cela se ressent-il dans son gameplay ?

La pomme n’est pas tombée loin de l’arbre, voire n’a jamais quitté sa branche

Ghost of Yotei s’impose comme l’héritier naturel de Ghost of Tsushima, tant il en reprend fidèlement la formule. L’aventure sur l’île de Yotei reproduit aussi bien les forces que les faiblesses de son aîné. On retrouve un Assassin’s Creed-like pleinement assumé, mêlant approches furtives et affrontements directs pour éliminer plusieurs cibles et libérer l’île.

Vous devrez vous allier à la faction adverse pour trouver du soutien dans votre quête et créer votre propre groupe, un élément rappelant les Assassin’s Creed, mais ici plus développé que dans le premier épisode. L’aspect rebelle défiant l’autorité est clairement mis en avant, porté par un vent de révolution qui se lève contre l’oppresseur un sentiment bien plus proche des productions Ubisoft que de celles de PlayStation.

Pour réussir votre quête de libération, vous devrez alterner entre combats et phases d’infiltration, toujours aussi efficaces et fluides que dans le premier opus, portés par une chorégraphie et une mise en scène spectaculaires. La formule souffre néanmoins des mêmes limites, notamment un manque de recul et de profondeur dans les affrontements, que cette suite ne corrige pas.

Là où Ghost of Tsushima brillait par la transformation progressive d’un samouraï vers la voie du ronin, Ghost of Yotei choisit de nous plonger directement dans cet entre-deux. Malheureusement, le plaisir est rapidement freiné par un long tutoriel d’environ deux heures. Malgré une liberté apparente, les premières séquences se révèlent très dirigistes, imposant une manière unique de jouer celle que le jeu a décidée pour vous.

L’une des rares véritables évolutions concerne l’interface. L’ATH, désormais plus minimaliste pour renforcer l’immersion, adopte un parti pris audacieux qui finit paradoxalement par nuire à l’implication du joueur. Si le vent servant à repérer les quêtes reste présent et toujours aussi appréciable, les missions principales sont désormais soumises à un temps d’attente avant de pouvoir progresser. Il faut ainsi accomplir une ou deux quêtes secondaires aléatoires pour récolter suffisamment d’informations sur la prochaine cible. Une mécanique qui, bien qu’un peu plus crédible sur le plan narratif, ralentit inutilement le rythme de l’aventure et risque d’en frustrer plus d’un souhaitant simplement avancer.Quelques QTE viennent ponctuer l’aventure, mais ils se révèlent finalement assez anecdotiques.

Mis à part cela, l’open world sert, à la manière d’un Assassin’s Creed Shadows, davantage de terrain d’entraînement pour améliorer ses compétences que de véritable monde vivant. L’arbre de compétences est d’ailleurs bloqué tant que vous n’effectuez pas certaines activités, ce qui freine parfois la progression. Quant aux événements aléatoires, ils existent bien, tout comme quelques lieux d’intérêt disséminés sur la carte, mais rien de vraiment marquant ne parvient à détourner notre attention de la quête principale. À une époque où la lassitude face aux mondes ouverts se fait de plus en plus sentir chez les joueurs, Ghost of Yotei peine à justifier le sien.

Ghost of Tsushima n’aurait pas du sortir sur PS5

Ghost of Yotei est beau, mais est-ce vraiment révolutionnaire ? Pas forcément. En 2025, même les plus petits studios peuvent désormais proposer de somptueux graphismes grâce à l’Unreal Engine 5, portant ainsi le nombre de concurrents dans la course visuelle à une véritable pléthore. L’effet waouh n’est donc clairement plus réservé aux grands studios.

Surtout quand le remaster de Ghost of Tsushima, sorti trois ans plus tôt, affichait déjà des qualités visuelles similaires voire les mêmes assets. Cette sortie coupe ainsi l’herbe sous le pied à Ghost of Yotei, qui ne peut plus vraiment se targuer d’offrir des graphismes véritablement next-gen sur PlayStation 5. C’est beau, certes, mais malheureusement, c’est désormais du déjà-vu.

Bien que certaines suites réutilisent elles aussi le même moteur, elles parviennent au moins à proposer des environnements et des atmosphères distincts. Ici, cette redondance saute rapidement aux yeux des joueurs.

Certes, malgré quelques détails ajoutés comme le sang ou la poussière dans l’eau, le résultat reste satisfaisant, mais globalement inchangé. Après un Horizon Forbidden West ou un somptueux Death Stranding 2, il devient difficile d’être encore impressionné. Malgré tout, Ghost of Yotei conserve le mérite d’offrir de très beaux décors et des textures particulièrement soignées sur console PlayStation.

Conclusion

Les points positifs

  • Le retour de la licence
  • Des détails graphiques bluffants (sang et poussière dans l’eau…)
  • Un gameplay toujours maîtrisé et satisfaisant
  • Une immersion plus poussée (carte, interrogatoires)
  • Un scénario qui se révèle dans les dernières heures

Les points négatifs

  • Un tutoriel d’introduction étiré sur plusieurs heures
  • Davantage un DLC qu’une véritable suite
  • Une héroïne manquant de profondeur
  • De nombreuses similarités avec la version PS5 de Ghost of Tsushima
  • Un open world un peu vide

Qu’on se le dise : Ghost of Yotei ressemble davantage à une extension de luxe qu’à une véritable suite. Même direction artistique, même gameplay, mêmes sensations. Mais est-ce que je recommande Ghost of Yotei ? Oui ! Sucker Punch maîtrise toujours son art, même s’il ne prend aucun risque. Le studio joue clairement la carte de la sécurité, mais livre une aventure solide, efficace et parfaitement calibrée. Le récit fonctionne, bien que prévisible, et reste loin de la profondeur émotionnelle de son prédécesseur. Un nouvel épisode soigné, qui coche toutes les cases sans jamais vraiment surprendre. Alors, si vous souhaitez faire escale sur Yotei après avoir foulé les terres de Tsushima, il n’y a qu’un pas. Pour les autres, vous pouvez toujours sauter dans le vide, il paraît qu’une botte de foin vous attend en bas.

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